COMMENT EVITER LE SYNDROME DU MI AIGU ?

(info-musicollège n°6 - janvier 1999)


Le Mi aigu n'est pas une note de plus, mais un passage vers l'octave supérieure de la flûte qui exige, à ce titre, un apprentissage spécifique.
Pour de nombreux professeurs, le Mi aigu semble réunir toutes les difficultés qu'il est possible de demander aux élèves : ce serait une sorte d'Himalaya de la tessiture en flûte dont l'ascension s'accompagnerait de vertiges sonores et sifflements d'oreilles, une position précaire dont naîtrait une paralysie générale interdisant tout enchaînement rapide avec une autre note.
Ces difficultés sont moins importantes qu'il n'y paraît et quelques précautions facilitent grandement cette étape redoutée.

- La difficulté réside dans l'émission et dans le doigté "pouce fléchi".
Pour l'émission du son, il n'y a aucune différence avec une autre note !
Toute tentation de souffler plus fort, d'articuler l'attaque avec plus de dureté doit être combattue, et cela d'abord chez le professeur qui, souvent autodidacte de cet instrument, induit ces pratiques par son propre exemple. Aucune crispation des doigts ni de la mâchoire, une pression d'air absolument identique à celle du mi grave accompagnée d'un souffle "chaud" (comme pour se chauffer les doigts l'hiver), et une articulation assouplie, "du" plutôt que "tu" permettent d'obtenir cette note aiguë avec naturel dans l'enchaînement du Mi-grave au Mi-aigu en octave.

- Plus aisé que certaines fourches (Fa bécarre ou Si bémol), le doigté ne présente, lui non plus, pas de difficulté particulière. Identique au mi grave, il n'en diffère que par le pouce fléchi : en cassant légèrement le pouce de la main gauche, l'ongle de celui-ci découvre très peu le trou d'octave (surtout pas un demi-trou comme le disent les tablatures).
Cette position fondamentale pour la deuxième octave est commune à tous les doigtés des notes supérieures au Mi aigu.
On ne peut faire l'économie de son usage, même si ce Mi aigu peut être émis sans le pouce. Mais c'est souvent cet apprentissage au rabais qui engendre par la suite des inerties de nos élèves dans l'enchaînement du Mi aigu aux autre notes : en croyant faciliter un apprentissage initial, on creuse un fossé qu'il sera encore plus difficile de franchir ensuite !
Enfin, connaître le doigté ne peut rendre compte de toutes les difficultés liées à l'enchaînement avec les autres notes. Il faut acquérir les successions suivantes au moyen de pièces adaptées (les textes d'Objectif 6e et 5e en tiennent fortement compte) : saut d'octave Mi grave/Mi aigu, mouvement conjoint Ré aigu/Mi aigu, mouvements disjoints avec d'autres notes graves (Sol/Mi aigu, Do/Mi aigu...) ou d'autres notes plus aiguës (Mi aigu/Sol aigu).

S'il est bien évident que le jeu de la flûte à bec soprano n'engage pas à utiliser les tessitures élevées en raison des stridences qui en résultent, il va également de soi que limiter le jeu instrumental à une neuvième (Do grave/Ré aigu) hypothèque considérablement les possibilités d'explorations tonales ou polyphoniques.

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